Giovanni Falcone

Couverture du livre Giovani Falcone

A Palerme, face au port, il y a cet émouvant mural sur le flanc d’un immeuble : les juges Giovanni Falcone et et Paolo Borsellino y sont immortalisés dans un instant complice. Deux hommes liés par leur amitié, leur lutte, et leur assassinat, en 1992, à deux mois d’intervalle.

Roberto Saviano consacre son nouveau roman au premier de ces deux hommes, Giovanni Falcone, tué dans un attentat commandité par la mafia, sur l’autoroute à la sortie de l’aéroport de Palerme le 23 mai 1992.

Dans les années 1980, Falcone et une poignée d’autres juges d’instruction enquêtent sur les rouages de Cosa nostra, la célèbre mafia sicilienne qui mène le marché de la drogue – un chiffre d’affaires quotidien, rien qu’à Palerme, de 400 millions de lires.

En 1983, la mort de Rocco Chinicci, le responsable du pôle d’instruction, inaugure une nouvelle forme d’assassinat plus violente que jamais: la mafia ne veut plus intimider elle veut terroriser ces justiciers. Dès lors, jusqu’à sa mort en 1992, Falcone vivra constamment sous sa menace.

Pourtant, cela ne l’empêchera pas d’accomplir sa tâche pour aller jusqu’au Maxi-Procès de 1986 à Palerme, où 346 accusés seront reconnus coupables et condamnés à diverses peine – 2665 années de prison, 114 acquittements 19 condamnations à perpétuité. Le recours en appel relaxera bon nombre d’entre eux et relancera la guerre contre la magistrature.

Palerme, 2017 (photo archives personnelles)

Comme dans les films, la frontière est mince entre les bons et les méchants – et nombreux sont ceux, parmi eux tous, qui ont intérêt à voir Falcone disparaître. Lâché par son entourage professionnel, méprisé, Falcone veut rester fidèle à son engagement dans la lutte anti-mafia, conscient de l’issue tragique qu’il connaîtra. Peu importe qu’il soit sous protection constante d’une escorte, Falcone est un homme traqué qui a rendez-vous avec son destin.

C’est un autre homme traqué, vivant aussi depuis deux décennies sous protection policière, qui retrace l’histoire de la mafia sicilienne et de la lutte d’un pôle d’instruction palermitain contre le crime organisé de Cosa nostra.

Saviano a choisi la forme du roman-enquête, où chaque chapitre a été précisément documenté pour démêler les tentacules de cette « piovra » qu’est la mafia sicilienne, et reflète l’incroyable travail fourni par Falcone et ses confrères.

Ce récit dense, aussi passionnant qu’exigeant, rend hommage à un homme d’honneur, qui a fait le sacrifice de sa vie pour lutter non pas contre un ennemi, mais contre tout un système économique…

Pour conclure, ces quelques mots empruntés à Paolo Borsellino (dans le film documentaire qui lui est consacré à votre sur Netflix):

Ceux qui ont peur meurent tous les jours, ceux qui n’ont pas peur ne meurent qu’une fois

Envie de découvrir d’autres lectures sur la mafia sicilienne? Retrouvez ici ma recension de « Fille du silence » de Carole Declercq.

Traduction: Laura Brignon

Titre: Falcone

Auteur: Roberto Saviano

Editeur: éditions Gallimard

Parution: février 2025

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