Vous le savez, j’aime vous parler ici de livres qu’on n’attend pas toujours, vous faire découvrir des ouvrages moins exposés que d’autres et dont le sujet me touche.
Pour des raisons personnelles avec lesquelles je ne vous ennuierai pas ici, le Maroc est un pays qui a une place très particulière dans mon coeur et dans mon histoire – découvert petite en famille, alors que la destination n’était pas encore dévorée par le tourisme, et que quelques heures d’avion suffisaient à nous téléporter dans une société qui semblait figée dans un livre d’histoire, c’était ma première approche de la culture musulmane, envoûtante de différence, de rituels, d’architecture. L’appel du muezzin, de terrifiant pour l’enfant de huit ans, s’est mué en un chant hypnotique, apaisant et puissamment vivant.
Image d’Epinal d’un temps révolu, ce pays à la fois si lointain et si proche a affiché au fur et à mesure de mes voyages ces quinze dernières années des changements très forts, sur lesquels je me suis interrogée. Aussi, comprendre le Maroc à travers le regard d’un de ses enfants, homme de ma génération, m’est apparu comme une nécessité lorsque Driss Ghali m’a parlé de son récit.
Expatrié au Brésil, l’auteur est revenu plusieurs semaines sur sa terre natale au décès de son père. A travers le voile du deuil, la figure paternelle s’est imposée pourtant, plus présente que jamais, faisant revivre les souvenirs, mais surtout, donnant au fils l’occasion d’un ultime échange qui libère la colère et le désenchantement face à un pays qui n’a pas rempli ses promesses – pire, les a trahies.