
Joseph est né au sortir de la grande guerre. Le père, gueule cassée, est mort depuis longtemps.
Peu importe, il ne l’a pas connu, et puis il est heureux avec sa mère Colette la joyeuse, et sa grand-mère Florentine. Elles le chérissent, ce petit garçon qui siffle déjà comme un artiste.
Colette a un amoureux, et tout dérape: l’avortement, et la mort qui la cueille.
Joseph n’est pas seulement orphelin, il est la honte de la nation, et sa mère une traitre qui se retrouve punie d’avoir voulu refuser de repeupler la France.
Double peine, car bientôt le petit garçon de sept ans va se retrouver pupille de l’état.
L’assistance publique, pourquoi la craindre? Elle prend soin des enfants, non?
Il est en sécurité, maintenant il est assisté par l’état, comme la grand-mère, chacun à sa place, dommage qu’on ne puisse pas les partager
L’engrenage est en marche: le placement en famille nourricière à la campagne pour prêter ses bras de petit garçon aux durs travaux de la ferme, la faute qui fait de lui un hors-la-loi de neuf ans, la prison de la Petite Roquette aux méthodes glaçantes pour remettre les enfants sur le droit chemin, et puis le surclassement en colonie pénitentiaire à Mettray à dix ans – la primeur des mauvais traitements, des humiliations, du travail surhumain. « A dix ans il est temps d’être un homme » et Joseph va puiser au fond d’une volonté immense la force de survivre au quotidien inhumain infligé à ces enfants.
Lire la suiteAinsi il est arrivé parmi les vicieux de la République, le vivier de la racaille, et il y a pris sa place