Retour à Birkenau

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J’espère que vous ne pensez pas que j’ai exagéré, au moins?

C’est ainsi que Ginette Kolinka conclut son témoignage dans Retour à Birkenau, soixante-quinze ans après avoir été déportée à Birkenau.

Un témoignage plus que jamais nécessaire, à l’heure où un français sur dix (UN SUR DIX!!) affirme  ne pas avoir entendu parler de la Shoah. Comment est-ce même imaginable?

La journaliste Marion Ruggieri a recueilli les mots de Ginette Kolinka, mais c’est bien elle qu’on écoute en lisant ces lignes, une femme de quatre-vingt-quatorze ans revenue des camps de la mort qui a survécu à l’inimaginable – tellement inimaginable qu’à l’instar de la plus grande majorité des déportés elle a choisi de se taire à son retour.

J’ai eu cette chance de revenir et de reprendre une vie normale, et d’être heureuse. Il ne faut pas être trop intelligent dans la vie. Si vous êtes trop intelligent, si vous réfléchissez trop… Moi, je ne réfléchis pas, les choses arrivent, ce n’est pas moi qui décide.

Ginette Kolinka se livre avec une émotion décuplée par l’humilité de son récit. 

Son histoire, c’est celle de millions de juifs, et pourtant son histoire est unique, comme elle est unique à chacun. 

Unique à chaque individu que les nazis ont tenté de déshumaniser, en lui enlevant tout, ses biens personnels, ses vêtements, ses cheveux, et en le tatouant comme une bête, pour le parquer ensuite avec d’autres bêtes.

Les souvenirs de Ginette Kolinka ressurgissent – d’autres sont définitivement envolés.

Celui de son père et de son petit frère aussi, mais la terrible culpabilité de les avoir envoyés vers le camion pour leur épargner une fatigue supplémentaire sans imaginer que le camion les conduirait à la mort, elle, reste.

Evoquer Ginette Kolinka, c’est invoquer la mémoire de ses camarades de déportation, Marceline Loridan-Ivens et Simone Veil. 

Au retour des camps, chacune a poursuivi son chemin et réussi à construire une vie, avec ses blessures profondes. Si Marceline et Simone ont eu des parcours qui les ont davantage exposées que Ginette, toutes les trois ont gardé de leur déportation un lien qu’il n’est pas nécessaire d’expliquer.

Elie Buzyn, comme Ginette Kolinka, était présent avec elle à LA GRANDE LIBRAIRIE le 8 mai 2019.

A 90 ans, l’homme déporté à 15 ans à Auschwitz livre un nouveau témoignage Ce que je voudrais transmettre (éditions Alisio).

Le régime nazi a exterminé six millions de juifs.

Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’une poignée à pouvoir témoigner.

Qui sera là pour le faire quand ils ne seront plus? 

Qui entretiendra l’Héritage de la Shoah, dont nous devons tous nous sentir dépositaires?

Il est aujourd’hui de notre devoir, à l’heure où l’antisémitisme ressurgit, d’entretenir la mémoire de la Shoah, la mémoire des déportés, la mémoire de ceux qui ne sont jamais revenus.

Il est de notre devoir de ne pas oublier l’existence des camps, de ne pas laisser disparaître les traces – aujourd’hui, déjà, la vie a regagné ces endroits. L’herbe y est verte. Ginette Kolinka dit même qu’on y trouve deux rangées d’arbres et un petit ruisseau, un lieu qui à toutes saisons est tout simplement magnifique. Les sportifs y font leur jogging. Les gens vivent à côté dans l’indifférence. L’odeur de la fumée n’est plus, le bruit des trains non plus.

Mais.

On y marche toujours sur des morts.

Lorsque Ginette Kolinka dit aux élèves qu’elle accompagne depuis vingt ans lors de visites: « Sous chacun de vos pas, il y a un mort », il faut l’écouter. Il faut la croire. C’est vrai. Lorsque j’ai visité le camp de Buchenwald à l’âge de vingt ans, j’ai senti qu’ils étaient là et je n’ai réussi à entrer qu’au bout d’un long moment, paralysée par la sensation d’écraser de mes pas toutes ces âmes restées là. Je n’avais donc pas tort de ressentir cette effroyable émotion. Ils sont bien là.

Aujourd’hui, il est de notre devoir de transmettre à nos enfants cette mémoire, et peut-être même de faire un pacte avec eux pour qu’eux aussi continuent à transmettre. Qu’en pensez-vous?

Cette transmission, elle peut déjà commencer ici.

Entre nous, pour l’étendre jusqu’en dehors de notre communauté de lecteurs.

Partageons les témoignages que nous connaissons, faisons-nous découvrir les livres qui nous ont marqué.

Ceux que l’on peut faire découvrir à nos enfants.

Partagez-les sous hashtag #transmettrelamemoirejuive et faites-le vivre.

Toute cette souffrance ne doit pas être vaine, le souvenir ne doit pas s’éteindre. Cultivons-le!

 

Pour aller plus loin, vous pourrez consulter ici la synthèse du sondage réalisé par l’IFOP en décembre 2018.

 

Titre: Retour à Birkenau

Auteur: Ginette Kolinka avec Marion Ruggieri

Editeur: Grasset

Parution: mai 2019

7 réflexions sur “Retour à Birkenau

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