
24 heures dans la vie d’une femme – ou comment, en une journée, une femme va remettre en perspective toute sa vie.
Ellie a passé tous ses étés dans la maison de vacances construite par son grand-père à Cape Cod. Surnommé le « Palais de papier » à cause de ses cloisons bon marché qui s’effritent, le bungalow spartiate renaît chaque été, en même temps qu’on en chasse les souris et toutes les bêtes qui y ont fait leur nid pendant l’hiver. Le luxe de la maison réside dans le Bois Sauvage où elle a été érigée, et dans le lac et l’océan dont elle jouit.
C’est un nouveau soir d’été, où les amis de toujours se retrouvent, boivent, et où tout bascule entre Ellie et Jonas, son meilleur ami depuis leur tendre enfance.
Au petit matin, face à cet étang qui depuis 50 ans a été témoin des drames de sa famille, Ellie sait qu’elle va devoir faire un choix: poursuivre son chemin comme si de rien était auprès de son mari Peter et de leurs trois enfants. Ou alors, bifurquer, tout quitter, pour rejoindre Jonas, à qui son coeur appartient depuis quatre décennies.
En alternant les heures qui s’égrènent jusqu’au choix qu’elle va devoir faire, les flashs se succèdent en remontant le passé, revisitant les moments fondateurs de l’enfance, et remémorant les secrets scellés par les promesses.
Avec une efficacité implacable, Miranda Cowley Heller nous embarque immédiatement dans cette saga familiale aux parcours de vie chahutés depuis l’enfance – celle de la mère, Wallace, une femme libre mais malmenée par les hommes, et celles d’Ellie et sa soeur Anna, ballottées entre leurs parents depuis leur divorce et remariages respectifs. A Cape Cod, Ellie oublie tout, toute entière à la vie sauvage qu’elle y mène, explorant la nature, se baignant dans le lac et l’océan. Et puis il y a Jonas, de 3 ans son cadet – il est son meilleur ami depuis qu’il a 8 ans. Lui, à cet âge, savait déjà qu’il veut l’épouser. Puis vinrent les serments, les promesses, et les terribles secrets qui, pour mieux rester à l’abri, ont vu Jonas s’éloigner…
Comment une vie peut se construire sur une blessure et sur un mensonge… c’est toute l’histoire d’Ellie racontée avec brio.
Les personnages, principaux ou secondaires, sont tous formidablement incarnés. La narration, éclatée entre présent et passé, offre un rythme diablement efficace.
Et La nature sauvage des lieux, dont les personnages ont fait leur terrain d’observation, de jeu, et d’apprentissage, est décrite tout au long du roman avec un réalisme immersif: ici, la beauté du ciel, là, les eaux insondables du lac, partout, les oiseaux, les poissons, les insectes, les pieds nus qui foulent les herbes et les racines des arbres. Et la mer, évidemment, indomptable.
« La mémoire de l’eau » n’est pas sans rappeler les romans d’Elin Hilderbrand et, par son aspect naturaliste, évoque le flamboyant « Là où chantent les écrevisses ».
Le livre est certes plus romanesque que littéraire, deux courtes scènes un peu crues auraient gagné à être écrites plus subtilement, mais il n’empêche: c’est un coup de coeur, qui permet de prolonger avec bonheur les lectures d’été.
J’y ai retrouvé, par la magie du récit, la beauté de Cape Cod et des lieux découverts cet été.
C’est d’ailleurs là-bas, lors d’un passage en librairie, que j’étais tombée sur la VO de ce roman, dont le titre original est « The paper palace ». J’ai longtemps tourné autour (il est estampillé @reesesbookclub par lequel était passé… « Là où chantent les écrevisses », tient tiens!) hésitant à l’acheter. A peine rentrée de voyage, en plein début de rentrée littéraire, merveilleux hasard, le roman sortait en France!

Traduction: Karine Lalechère
Titre : La mémoire de l’eau (The Paper Palace)
Auteur: Miranda Cowley Heller
Editeur: Presses de la cité
Parution: 18 août 2022
Ravie de te lire ici aussi sur ce coup de cœur partagé !
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