
N’y allons pas par quatre chemins: j’étais à ça d’abandonner ce roman pourtant tant attendu.
Il y a deux ans, j’avais eu un énorme coup de foudre littéraire pour « Napoli mon amour », d’Alessio Forgione.
Le nouveau héros de Forgione s’appelle Marco. Cet adolescent de quatorze ans, qui habite un quartier difficile de Naples, a eu bien du mal à m’embarquer. Il faut dire que le foot, ce n’est vraiment pas mon truc, et que Marco joue au foot, que le foot occupe ses journées et ses week-ends, et une bonne partie du début du roman – c’était terriblement ennuyeux pour moi.
Alessio Forgione nous avait pourtant déjà fait part de son amour du foot dans Napoli mon amour, mais au moins, Amoresano, son héros, n’y jouait pas. Il se contentait de regarder les matchs du SC Napoli.
Finalement, quelque chose en Marco a dû me toucher, parce j’ai continué ma lecture.
Marco vit avec son père, dans le grand appartement que sa mère a abandonné quelques années plus tôt. Depuis, elle n’a plus donné aucune nouvelle, et son absence laisse un trou béant dans le coeur de Marco. Son père et lui ont peu à se dire, quand ils se croisent pour dîner. C’est un père triste, un peu largué, qui essaie de veiller au mieux sur son fils, l’accompagne à ses matchs le dimanche, le réprimande pour ses notes catastrophiques au lycée. Sans vraiment voir ce qui se passe à côté.
Marco s’en fiche, du lycée. Il étudie le latin, et il a horreur de ça. Il préfère traîner dans le quartier avec son meilleur ami Lunno, son aîné de deux ans qu’il admire.
Lunno et Marco montent des petites combines, en cachette, achètent un scooter, en cachette, et les choses se compliquent davantage pour Marco.
Lorsqu’il rencontre Serena, il découvre le bonheur d’avoir une petite amie. Pour un garçon qui a été abandonné par sa mère, ce n’est pas simple d’accepter l’amour, mais peut-être qu’un horizon plus lumineux se dessine pour lui.
Pourtant, quelque chose plane. Quand on a lu « Napoli mon amour », on sait que la fatalité nous guette au tournant.
La vie n’est rien d’autre qu’une attente inconsciente. Puis elle arrive, et ça fait mal
C’est étrange, en lisant « Crier son nom », j’ai pensé qu’il ressemblait bien plus à un premier roman que « Napoli mon amour ». Et je ne serais pas étonnée d’apprendre un jour qu’il l’est.
Comme son titre original l’indique, « Giovanissimi » c’est un roman sur l’adolescence, qui n’a pas la maturité de son prédécesseur.
Le style littéraire d’Alessio Forgione est là, ses thèmes de prédilection aussi: un jeune homme un peu paumé mais sensible, l’omniprésence des rues de Naples, l’amitié avec un autre garçon aussi paumé que lui, la fumette, la quête de l’amour, le football, les virées à la plage, la fatalité.
Marco est un garçon attachant qu’on a envie de sauver, on aimerait être cette mère, peut-être qui l’a abandonné.
Pour autant, mon coeur n’a pas saigné, je ne suis pas restée exsangue comme m’avait laissée Amoresano deux ans plus tôt. Il m’a manqué l’intensité, la fièvre du précédent roman.
Mais cela n’enlève rien au talent d’Alessio Forgione, qui a une vraie voix et un talent évident.
Traduction: Lise Caillat
Titre: Crier son nom (Giovanissimi)
Auteur: Alessio Forgione
Editeur: éditions Denoël
Parution: août 2022