
Et si c’était dans les losers que la littérature trouvait ses plus beaux héros?
Amoresano pourrait être le Arturo Bandini napolitain.
Mais le livre fétiche d’Amoresano, c’est « Blessé à mort », de Raffaele La Capria.
Amoresano a bientôt trente ans, et il remplit le vide des ses journées en déambulant dans les rues de Naples. Les soirées, il les passe à regarder les matchs du Napoli en buvant des mauvaises bières à deux euros, de bar en bar. Et puis il fait ses comptes, car son solde à la banque est comme une épée de Damoclès au-dessus de sa tête.
Amoresano aimerait bien travailler, mais ses rares entretiens sont des échecs, alors il partage ses galères avec Russo, son alter ego de la lose. Deux trentenaires qui vivent aux crochets de leurs parents, piètres dragueurs et éternels glandeurs.
Sauf qu’Amoresano, il a la rage d’écrire. Le jour où il rencontre Lola, l’amour éclaire son horizon, et Amoresano entrevoit de l’espoir dans sa vie. Qui sait, il pourrait même caresser d’un peu plus près ses rêves d’écrivain. Alors il se raccroche à la vie, avec laquelle il voulait à peine plus tôt en finir.
A cet instant précis je me sentis méchant, capable d’attaquer et de conquérir, de tuer et de voler sans me poser de questions Et surtout de vivre. Juste de vivre.
Napoli mon amour, c’est une gifle qui claque fort, aussi fort que l’amour de Naples qui transcende les lignes d’Alessio Forgione, aussi fort que le mal-être d’Amoresano, aussi fort que la beauté bouleversante des mots qu’il écrit.
J’écrivis et j’essayai de faire de chaque virgule une gifle, de chaque point un coup. Chaque retour à la ligne devait être un crachat au visage, de celui qui me lisait et de la vie, qui m’avait contraint à écrire ce que j’écrivais
L’écriture d’Alessio Forgione affiche une fausse nonchalance qui travestit pudiquement le désespoir et nous magnétise par ses fulgurances poétiques. Et que dire de cette tendresse, tricotée de sensibilité et du bouleversant mal-être d’Amoreso?
Napoli mon amour, ode à cette ville qui m’est si chère, ode à la littérature qu’Amareso dévore, ode au cinéma dont Amareso décortique les classiques, ode aux anti-héros, ces gueules cassées de la littérature, Napoli mon amour a ravi mon coeur, a usé la pointe de mon crayon qui a souligné des dizaines de lignes, et m’a laissée désemparée en refermant le livre.
Alors comme Amareso qui dépense par dépense tient ses comptes, surtout quand il est amoureux car ses attentions amoureuses pourraient vider son compte plus vite que prévu, je vais conclure par une dépense à mettre à votre budget, le prix d’une dépense utile, même si un coup de coeur n’a pas de prix. 20 euros.
Traduction Lise Caillat
Titre: Napoli mon amour
Auteur: Alessio Forgione
Editeur: Denoël
Parution: janvier 2021