César n’arrive pas à faire le deuil de Paz, sa sublime et lumineuse femme, l’ancre de sa vie. Paz avait-elle décidé de les quitter, lui et leur fils ? Il n’aura jamais la réponse, que Paz a emportée deux ans plus tôt en se noyant au fond de l’océan… Impossible pour César de revenir à la vie, d’être un père pour son jeune garçon, alors il décide de mourir. Grâce à internet, il s’est procuré un petit kit de suicide qui contient quelques pilules, qu’il décide d’avaler méthodiquement dans sa cuisine, un soir d’été… alors qu’il sent déjà son corps s’affaiblir une fois les premiers cachets avalés, une jeune femme sonne à sa porte. Nana, jeune beauté grecque, étudiante en architecture et nouvelle voisine de César, a perdu ses clés et vient se réfugier chez lui, perturbant César dans ses projets de mort. Qui est cette Nana, aussi belle et gracieuse qu’érudite, qui pioche dans la bibliothèque de César et s’entretient avec lui des mythes antiques ? Tant de mystère plane au-dessus de Nana. Qui est-elle vraiment, et pourquoi reste-t-elle inaccessible malgré son désir de se rapprocher de César ? Pourquoi semble-t-elle vouloir protéger l’homme éploré, qui peu à peu accepte de laisser tomber l’armure antique de son veuvage ?
J’avais le sentiment étrange que tout ce qu’elle faisait était destiné à me faire plaisir
Le monde dans lequel évolue Nana a tout pour séduire César, et chaque parcelle de sa vie est une piqûre qui le réanime, en même temps que les mythes grecs que César convoque au fur et à mesure de cette étrange relation…
Devant les avis enthousiastes de nombreux lecteurs, je suis partie dans ma lecture avec de très hautes attentes… Aussi ai-je été surprise que le charme n’opère pas d’emblée, avec une première partie, contre toute attente, au style affecté. César s’y montre parfois détestable, et je n’ai réussi à éprouver aucune empathie pour cet homme qui n’est même pas un anti-héros touchant, incapable de se mettre des coups de pieds aux fesses pour s’en sortir.
Il se dégage à mon goût une certaine prétention de ce personnage, qui dans sa déprime n’en oublie pas pour autant un certain goût de l’esthétique et a le culte de la femme parfaite, qu’il lui semble naturel de mériter – que ce soit Paz ou Nana, l’une et l’autre sont magnifiées : corps de lianes fermes, musclés et bronzés, jambes longues et poitrines voluptueuses, comme si l’imperfection ne pouvait faire partie de son monde et était réservée aux autres. Il la jette au regard, cette imperfection, avec arrogance :
Si Aqualand est le royaume des rapides et des virages vertigineux, il est aussi celui de la graisse. La peau d’orange, le plus souvent anglaise, parfois allemande, luit sous la crème solaire. Le spectacle est violent
Parfois le roman vire au mièvre et je n’ai pu m’empêcher de sourire aux descriptions des ébats de César et Paz :
Elle avait tourné la tête vers moi. Sa bouche humide était à dix centimètres de la mienne. « Pas ici, restons humble »(…). Mes doigts avait repris leur exploration, avec succès cette fois. Nos soupirs s’étaient mélangés, bientôt avalés par le bruit assourdi des vagues.
De grâce… !
La lecture était donc mal partie, et j’ai cru qu’il ne me serait vraiment pas possible de Croire au merveilleux. Est-ce le masque du héros qui est tombé, ou est-ce la magie des mythes qui a opéré, mais le récit a finalement réussi à m’emporter.
César revient à la vie et accepte l’éventualité d’aimer une nouvelle femme. Et comme César, le lecteur tombe sous l’emprise de cette fascinante Nana
S’il se passe quelque chose, eh bien il se passera quelque chose. C’est ça ou c’est moi qui meurs. Il vaut mieux la petite mort, celle qui rend plus vivant, tu ne crois pas ?
A travers le récit, l’auteur fait vibrer son amour de l’antiquité que l’on devine sincère. Quelle ne fut pas ma surprise d’y lire en miroir mon histoire :
Elle veut savoir d’où ça vient, ce goût. Elle veut que je raconte. Comment, sur la côte normande, une prof m’a un jour pris la main et dirigé vers cette langue dont l’alphabet m’ensorcelle. J’ai treize ans. On est six ou sept filles ou garçons, pas plus. Le cours prend très vite des allures de rassemblement secret car il a lieu le samedi, quand le collège est presque vide
Pour autant, mes cinq ans de grec ancien m’ont laissé peu de traces, car si j’ai pu déchiffrer sans problème les passages en grec du roman, les comprendre fut tout autre chose (heureusement, ils sont traduits… !)
Suite du roman Plonger, qu’il n’est pas nécessaire d’avoir lu pour aborder Croire au Merveilleux, ce dernier n’est pas seulement un roman sur le deuil et l’amour, il revisite l’enfance et ce qu’on doit en garder. C’est un voyage : au sens propre d’abord, qui nous emmène de la côte amalfitaine à la Grèce et nous fait atterrir au Japon, comme au sens figuré – le voyage personnel que le narrateur doit faire pour trouver la réponse à la question qui le hante, et pouvoir revivre. La fin, que je ne trahirai pas, si loin de tout, m’a particulièrement plu. Je me suis réconciliée avec César.

On referme le roman heureux, car on sait que l’on peut laisser César, tranquillement, retourner apaisé à sa vie d’homme et de père. Pour le meilleur.
Titre: Croire au merveilleux
Auteur: Christophe One-dit-Biot
Editeur: Gallimard
Parution: 2017
Je ne le connaissais pas du tout, mais le titre est tout beau et ce que tu en dis aussi. La mythologie grec m’a toujours fortement intéressée et résonne encore en moi. Du coup j’ajoute ce titre directement dans ma wish list !
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Oui, c’est une belle façon de revisiter la mythologie, et de voir que tous les mythes sont universels et intemporels. Je te souhaite une belle lecture!
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J’ai lu Plonger, que j’avais beaucoup aimé, et j’ai hâte de lire celui-ci… Tout comme toi, je trouve le narrateur César très antipathique et arrogant. On a envie de lui donner une bonne paire de claques… C’est sûrement la force de Christophe Ono-dit-Biot que de nous faire aimer son roman sans pourtant adhérer à son personnage principal…
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J’ai un beau souvenir de Plonger où César s’attarde sur son histoire d’amour plutôt tumultueuse avec Paz. Je me souviens aussi de beaux passages émouvants sur son rôle de père et sur son petit garçon.
Pour ma part, j’ai eu du mal avec le personnage de Paz dans Plonger. Un peu trop mystérieuse à mon goût! Je lirai ce nouveau roman, c’est certain!
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Si la deuxième partie de ce livre est vraiment belle, je reste encore partagée sur la première, et ce style que j’ai trouvé un peu pompeux, un peu prétentieux. Du coup, je ne suis pas sûre de lire un jour Plonger, même si je n’en ai lu que du bien à travers différents avis. Ou disons qu’il n’est pas dans mes priorités. Je devine ce que tu veux dire avec Paz, car l’auteur reproduit un peu cela dans ses souvenirs d’avec Paz qu’il évoque. Mais peut-être seras-tu plus enthousiaste que moi, d’emblée, étant donné que tu as aimé Plonger…
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