
Une tornade apocalyptique, quatre orphelins: voici le point de départ de cette histoire menée tambour battant par une auteure prodigieuse dont Zoomania est le deuxième roman (je n’ai pas lu le premier, Farallon Islands, mais je vous avoue que maintenant j’ai vraiment envie de m’y frotter).
Les enfants McCloud ont tout perdu dans la tornade qui a dévasté Mercy, Oklahoma, emportant leur maison, les vaches, les chevaux, et leur père. Réfugiés dans l’abri de la cave, ils ont survécu – mais leur vie dorénavant se résume au mobilhome d’un terrain de camping, dans un extrême dénuement. Darlene et Tucker, les aînés, ont pris en charge les deux benjamines Jane et Cora. Le choc de l’ouragan a été si violent que Cora, âgée de 6 ans à ce moment, a tout oublié de sa vie avant la tornade. Plus de souvenirs de son père, envolés avec lui. Quant à sa mère, cela ne fait aucune différence, elle n’en avait aucun: elle est morte en couches, à la naissance de Cora.
Seuls, les quatre frères et soeurs se serrent les coudes, jusqu’au jour où Tucker se fâche avec Darlene et disparaît.
Trois ans après la tornade, l’usine de cosmétiques, le principal employeur du coin qui avait miraculeusement résisté, malgré un flot de déchets toxiques déversés dans l’environnement, explose sous l’effet d’une bombe.
A travers les dégâts causés par la déflagration, les animaux de laboratoire s’échappent, comme libérés par une main vengeresse.
Peu de temps après, Cora disparaît sans laisser de traces – et malgré les recherches de la police, nulle trace d’elle. Désemparée, Darlene ne veut cesser d’espérer – loin d’imaginer le périple que sa petite soeur est en train de vivre.

Racontée tour à tour du point de vue de Darlene et de Cora, l’histoire nous entraîne dans un road trip vers la côte ouest, là où se trouve l’océan, que les quatre frères et soeurs n’ont jamais vu. Impossible de vous en raconter plus sur ce roman, qui, sur fond de militantisme écologique, étudie avec beaucoup de profondeur les liens du sang, la responsabilité et la loyauté qu’ils impliquent.
De très beaux personnages s’opposent, et déchirent la petite Cora: d’un côté Darlene, la voix de la raison, substitut maternel. De l’autre, Tucker, le frère chéri, que la tornade a profondément bouleversé et qui a laissée Cora désemparée lorsqu’il est parti.
J’étais pareil avant, disait Tucker. La tornade m’a changé.
Elle avait fait tomber la façade de la civilisation humaine. Elle lui avait rappelé que lui aussi était un animal. Les termes scientifiques – « disparition de l’habitat », « zone morte », « en voie de » – n’étaient désormais plus seulement des mots. Il les vivait au plus profond de lui
Attention, ce roman n’est pas un roman militant, ni politique (je vous ai vus un peu piqués au vif par les mots « militantisme écologique »!!). Mais il s’empare d’un sujet, la cause animale, qui va vers un final bluffant, effrayant, époustouflant – et qui m’a un peu fait penser à un croisement de la fin du roman « Les animaux » de Christian Kiefer avec le film Zootopia!
Extrêmement bien écrit (traduction de Céline Leroy), d’une belle profondeur psychologique, Zoomania est un roman hypnotique qui nous parle de ce qui façonne les êtres, et en fait des humains, avec toutes leurs croyances, et leurs responsabilités.
Titre: Zoomania
Auteur: Abby Geni
Editeur: Actes Sud
Parution: janvier 2021
J’ai moi aussi adoré ce roman qui amène avec beaucoup de finesse le sujet du militantisme écologique sans en faire trop. Ayant lu et aimé Fantômes, j’ai bien envie de découvrir Les animaux vu le parallèle que tu fais 🙂
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